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Miles #35 - A l'Heure de Berlin

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Miles #35 - A l'Heure de Berlin

SUBCULTURE Trente ans

SUBCULTURE Trente ans que le musicien Mstislav Rostropovitch accompagnait la chute du mur de son vio- parler de Berlin aujourd’hui ? Avec des gens : des Berlinois de souche ou d’adoption. De l’est et de l’ouest. Avec des artistes. Des étrangers visiteurs ou immigrés. Avec des images ? Des photos ? Des mots ? Avec un homme, Joachim von Beust, originaire de Stuttgart, qui connaît Berlin, sent Berlin, comprend Berlin, a vécu Berlin pendant toutes ces décennies. Un témoin privilégié. Notre interlocuteur, Cette ville tellement particulière que dès que l’on en sort, on ressent le vide, le désert. Pas d’Hinterland, comme disent les Allemands. Après la guerre, elle revit de manière autonome. C’est aujourd’hui une ville de touristes, au manger, mais pour sortir. Dans les années 20, elle rivalisait avec Paris. Ber- certains quartiers, comme le célèbre Kreuzberg où les artistes avaient leurs les chercher. La ville est gigantesque et vide : 3.800.000 habitants alors qu’elle a été construite pour plus du double ! Elle n’a jamais réussi à attirer davantage de cafés. Il y a aussi beaucoup d’étrangers qui se sont bien intégrés. de l’autre, sans se connaître. En s’ignorant. Les plans de la ville à l’époque avait rien. Nichts. Die Leere. Pays martyrisé par lui-même. Après la chute du mur, tout y était en double avec une compétition effrénée de part et d’autre. ville est divisée en 21 districts à la tête desquels il y a un bourgmestre en chef, ont énormément d’humour, un humour particulier de la même trempe que l’humour britannique. C’est la seule ville d’Allemagne où les magasins ouvrent et ferment quand ils le veulent, même si cela est en train de chan- Travail, le 1 er léré. Tout le monde acceptait cela. À Berlin, la tolérance vis-à-vis de la subculture est énorme. Les Berlinois adorent la culture. Beaucoup de jeunes de la ville, la clientèle manque. Tout est très limité par rapport à Cologne, sont les inventeurs avec « Autobahn ». Il faut écouter « Fun, fun, fun » qui est JOACHIM VON BEUST, COLLECTIONNEUR D’ART CONTEMPORAIN À L’ORIGINE DE LA FONDATION KUNSTRAUM dans quatre autres villes d’Allemagne (Stuttgart, Baden Baden et Dusseldorf), qui n’ont rien en commun avec Berlin. C’est pour cela que j’ose le dire, crier haut et fort la particularité unique de cette ville. » Depuis peu, Joachim s’intéresse à l’art avec beau- Un artiste belge et ami, Michel Mouffe, l’a pris par a donné des clefs. Le projet artistique qu’il vient d’inaugurer il y a à peine quelques semaines est une passion, sans but lucratif. Un espace physique à Uccle, doublé d’un espace digital basé sur des petites vidéos en ligne sur leur site www. suivre l’évolution de quelques artistes émergents, leur processus créatif. « Berlin est une ville qui jouit d’une aura internationale depuis 400 ans ! Elle apporte quelque chose, une dimension que les autres villes n’ont pas. Berlin a toujours été une ville d’accueil, la grande ville du temps des protestants : elle a avec la vague des Huguenots qui fuyaient la France. Ils y étaient bien accueillis. Et Berlin vit toujours sur ses communautés. L’état est gé- laient ces dernières années. Elle est aussi très verte. Bien que je n’aie aucune sympathie pour le communisme, il y avait des choses intéressantes sous le régime, entre autres pour les enfants. L’enseignement des petits, le Kindergarden a été copié dans toute l’Europe. Et à la chute du mur, on a bêtement tout abandonné, sans avoir l’intelligence mencé à zéro. J’y ai travaillé pendant des années à la tête d’une entreprise qui était comme un 58 Toute copie non autorisée est strictement interdite sans le consentement écrit préalable de Produpress SA/NV.

inspiré des Beach Boys ! Beaucoup d’Espagnols comme Ricardo de Larrea y ont émigré pour cette raison, movida dans le sang. En art contemporain, il y a bien le Hamburger Bahnhof, mais la ville se À SAVOIR : La partie est de Berlin est de loin la partie la plus importante historiquement et culturellement avec en son cœur, le district Mitte. Ce sont les Russes qui ont gagné la ville après la guerre, car ils ont tout pris, la partie la plus riche, la plus intéressante. Ils ont eu Mitte et ont uniforme, monotone et sans sourires. Partout la même chose. Envahie par l’odeur omniprésente de la Trabant, une voiture en «carton» avec un moteur 2 temps. Tout le monde en voulait une, mais le régime ren- l’une des meilleures illustrations de la ville à l’époque communiste. © Benoit Feron À FAIRE : pour sentir la ville, parcourir le chemin du mur (1km) peint Brandenburger Tor. PORTRAIT de la ville à travers différentes personnalités qui soit en sont originaires, soit y vivent, soit y sont régulièrement. partie d’un réseau international qui dialogue avec des artistes africains et européens pour s’inspirer belge Bernard Gilbert et le peintre allemand d’origine japonaise Kanta Kimura qui vit à Berlin. Une passion à suivre. Ivan Georgiev a étudié et vit à Berlin depuis 6 ans, venu rejoindre sa copine Teodora Zaharieva qui y étudie depuis 10 ans IVAN 2013, je me suis installé à Berlin pour faire des déjà visité Berlin de nombreuses fois auparavant et j’avais déjà une idée du lien profond qui unit cette ville à l’histoire. Mais c’est dès que j’ai commencé à vivre ici que j’ai réalisé à quel point cette histoire est de celles qui restent toujours pertinentes, surtout aujourd’hui dans le mode de vie ou la pensée des Berlinois. Au début, j’ai accepté et puis j’ai découvert que c’était bien plus que cela. Ma plus forte impression est que Berlin, de par ses habitants, est collectivement «perspicace», contrairement à d’autres villes. Ses citoyens sont plus sensibles à l’idée générale selon laquelle des erreurs sont commises et peuvent surtout être commises facilement si la négligence s’installe. C’est pourquoi ils s’engagent dans la culture, l’art, le discours politique ou le militantisme et ce pourquoi j’ai le sentiment que Berlin essaie il est aussi important de prendre en considéra- blement la raison pour laquelle je me suis senti vite accepté à Berlin, en particulier par les gens de mon âge. Pour moi, Berlin n’est certainement pas étranger à la notion d’étranger. Je dirais que je suis d’accord avec l’adage qui dit que «Berlin n’est pas l’Allemagne», car elle est clairement très différente. Cependant, j’ai le sentiment que son désir Kanta Kimura est un peintre allemand d’origine japonaise qui, avec « Light Meets Color », inaugure la nouvelle Fondation Kunstraum. Chercheur en matériaux avant tout, il est surtout connu comme pionnier d’un style nouveau qui dynamise la toile. En effet, si au premier coup d’oeil ce ne sont que de chaotiques révèle une belle harmonie. www.kantakimura.com constant de continuer à s’améliorer et à construire un avenir meilleur demeure une caractéristique profondément allemande. Et pour cela, Berlin est emblématique à sa manière. » TEODORA 2009 pour étudier la psychologie. Au cours de ma e anniversaire de la chute du mur de Berlin. Cette année marque le 30 e anniversaire de cet automne et je suis très reconnaissante d’avoir passé les 10 dernières années dans une ville profondément marquée par son aspiration à l’unité, à la liberté et à la tolérance. À ce jour, Berlin se compose de parties ouest et est clairement distinctes, qui regroupent cation, la ville est toujours un grand chantier, parfois même un peu sale, mais en constante évolu- ensuite été divisée par un mur pendant de nombreuses années, mais c’est peut-être précisément la raison pour laquelle la ville est connue pour sa lérance. Tout le monde se voit offrir la possibilité une réaction particulière de gens connaissant l’ambiance de cette ville. Quelque chose peut être «tellement Berlin» de façon positive ou négative, et différent, pourtant ici, cela devient ou se révèle parfaitement normal et acceptable. » Toute copie non autorisée est strictement interdite sans le consentement écrit préalable de Produpress SA/NV. 59